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Le chemin parcouru – Chronologie de la lutte pour le droit au logement au Canada

Le 16 décembre 1966, l’Assemblée générale des Nations Unies a adopté le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Ce pacte fait partie de la Charte internationale des droits de l’homme et prévoit le droit à un niveau de vie suffisant (y compris la nourriture, l’eau, le logement et les vêtements). Le 19 mai 1976, le Canada a ratifié le pacte.

Pendant les plus de 30 ans qui ont suivi, des défenseurs des droits, des organismes, la société civile, des personnes ayant vécu en situation d’itinérance ou de logement inadéquat ont réclamé au gouvernement fédéral la reconnaissance officielle dans la loi du droit au logement et l’adoption de politiques efficaces afin d’assurer la mise en œuvre d’une démarche à cette fin et de veiller à ce que le dossier soit traité en priorité pour les groupes les plus vulnérables et les plus touchés de la société. Au cours de ces années, le problème le plus crucial soulevé par les Nations Unies, compte tenu des préoccupations et des signaux d’alarme croissants, résidait dans l’inexistence d’une stratégie du logement fondée sur le droit au logement. Devant une situation d’itinérance répandue et des problèmes de logement sérieux dans l’un des pays les plus riches du monde, aux Nations Unies, on s’inquiétait du fait que le Canada n’ait pas priorisé avec empressement l’adoption et la mise en œuvre d’une stratégie nationale sur le logement fondée sur l’obligation d’éliminer l’itinérance et la réalisation progressive du droit au logement en mettant à profit les ressources disponibles et tous les moyens nécessaires, y compris la loi. 

La décision du gouvernement fédéral d’adopter la Loi SNL en juin 2019 en déclarant le droit au logement à titre de droit fondamental de la personne et la mise en place d’un cadre novateur fondé sur les droits sont directement attribuables aux luttes acharnées menées par des groupes de la société civile et aux démarches entreprises par des organes de droits de la personne des Nations Unies afin de convaincre le Canada d’intervenir dans une crise évidente de droits de la personne.

En 2010, un groupe de l’Ontario formé de personnes ayant vécu l’itinérance, d’universitaires, d’avocats et de défenseurs des intérêts a entamé une contestation judiciaire en matière de droit au logement. Les groupes se disaient mécontents de l’inaction à l’égard de l’itinérance croissante et de la crise du logement inadéquat attribuable à des modifications aux politiques du gouvernement et à un désinvestissement dans les années 1980 et 1990. L’affaire Tanudjaja c. Procureur général du Canada et Procureur général de l’Ontario, également connue sous le nom de « question du droit constitutionnel au logement », alléguait que le refus des gouvernements fédéral et provincial de s’attaquer à l’itinérance conformément aux exigences du droit international des droits de la personne constituait une violation du droit à la vie, à la sécurité de la personne et à l’égalité pour les personnes les plus gravement touchées par l’itinérance. Selon la Cour suprême du Canada, ces droits doivent être interprétés conformément aux obligations du Canada en vertu des droits universels de la personne. Quatre personnes, soient Ansar Mahmood, Janice Arsenault, Jennifer Tanudjaja et Brian DuBourdieu, ainsi que le Centre for Equality Rights in Accommodation (CERA) se sont proposés comme candidats pour lancer la contestation. 

 Étonnamment, la Cour d’appel, dans une décision partagée à deux contre un, a rejeté la demande et refusé d’entendre la preuve complète réunie par les requérants. La question à savoir si le droit à la vie et à l’égalité des personnes sans-abri est protégé par la Charte demeure encore aujourd’hui en suspens et pourrait être résolue par la Cour suprême dans le cadre d’une affaire future. En attendant, toutefois, toute l’affaire a donné lieu à un vaste processus de développement de relations, de mobilisation de sympathisants et d’organisation communautaire exceptionnel. Face à une crise du logement et de l’itinérance grandissante, même pendant les années de prospérité économique au Canada, l’appel au gouvernement aux fins de la reconnaissance dans la loi du logement à titre de droit fondamental de la personne, de l’instauration d’un cadre fondé sur les droits pour assurer la responsabilisation et de l’adoption d’une stratégie nationale sur le logement fondée sur les droits s’est poursuivi et est devenu de plus en plus insistant.

Le 22 novembre 2017, lors de la Journée nationale de l’habitation, nous avons remporté notre première victoire. Le gouvernement fédéral a annoncé l’adoption d’une stratégie nationale sur le logement et son engagement en faveur de la réalisation progressive du droit au logement. Il a également promis l’adoption d’une loi à la suite de consultations visant à orienter l’approche axée sur les droits.

Le 14 août 2018, dans le cadre de la Campagne sur le droit au logement, on a adressé au premier ministre Justin Trudeau une lettre ouverte signée par plus de 170 signataires (totalisant plus de 1 00 signatures à la fin de la campagne, un an plus tard). Dans cette lettre, on exhortait M. Trudeau de respecter son engagement en faveur du droit au logement en reconnaissant ce dernier dans la loi sur la Stratégie nationale sur le logement. On lui demandait aussi d’établir des mécanismes de reddition de comptes, de fixer des objectifs et des échéanciers, de garantir une surveillance indépendante, de garantir la participation des titulaires de droits et l’accès aux audiences sur les problèmes systémiques affectant le droit au logement.

 Dans le cadre de la campagne, on a aussi préparé un avant-projet de loi décrivant la façon de procéder, en se fondant sur les éléments annoncés de la Stratégie nationale du logement. Le gouvernement fédéral a également tenu un processus de consultation auprès de groupes de partout au Canada afin d’éclairer la préparation de la loi.

Lorsque la Loi SNL a été adoptée le 8 avril dans la Loi d’exécution du budget de 2019 (projet de loi C-97), elle intégrait certains éléments fondamentaux, mais ne comportait pas de mécanismes significatifs de reddition de comptes à l’égard du droit au logement ni ne prévoyait l’accès à des audiences. La campagne a fait pression afin d’obtenir des amendements, notamment un engagement plus vigoureux en faveur du droit au logement et l’ajout de mécanismes suffisants de responsabilisation fondée sur les droits, dont l’accès à des audiences.

Des modifications à la Loi sur la stratégie nationale sur le logement ont été présentées le 29 mai 2019 au Comité permanent des finances de la Chambre des communes et le 31 mai, à la Chambre des communes. Ces modifications étaient largement conformes aux modifications proposées par la campagne à l’égard d’un engagement clair, décisif et sans ambiguïté dans la législation sur le droit au logement et de la mise en place de mécanismes essentiels de responsabilisation.

Le 20 juin 2019, le projet de loi C-97 contenant la Loi SNL et le droit au logement a été adopté par le Sénat, pour obtenir la sanction royale le 21 juin.

La reconnaissance dans la loi du droit au logement est le fruit de démarches de défense des droits menées par d’innombrables personnes et organismes d’un bout à l’autre du pays, qui se sont battus avec acharnement pendant des décennies à coup de protestations, de revendications et de contestations judiciaires.

Désormais, le défi consiste à exploiter cette nouvelle protection pour parvenir à éliminer l’itinérance et à réaliser le droit au logement pour tous.

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